Rencontre avec Camille Marc, Responsable du conseil et de l’incubateur
« Parce que donner rend meilleur et plus heureux et que toutes les causes sont bonnes, nous pensons que démocratiser le geste philanthropique peut aider à transformer positivement notre société », telle est la vision du Philanthro-Lab qui a ouvert ses portes en septembre dans l’ancien Hôtel de la Bûcherie à Paris. Camille Marc, Responsable du conseil et de l’incubateur, nous présente ce lieu inédit dont l’objectif est de démocratiser le geste philanthropique.
Camille Marc, quelle est la genèse de ce projet ?
C’est Philippe Journo, Président-Fondateur de la Compagnie de Phalsbourg qui en a eu l’idée. Philippe est un philanthrope de longue date qui consacre, avec son épouse Karine Journo, 20% de ses revenus à des causes d’intérêt général, notamment en faveur de la culture, la préservation du patrimoine et l’intégration des personnes en situation de handicaps visuels. Son credo c’est le « give-back » anglo-saxon, « je rends à la société ce qu’elle m’a donné ». En tant qu’entrepreneur immobilier il a ainsi répondu à l’appel à projets « Réinventer Paris » lancé par la Mairie de Paris en 2014 et a proposé de créer ce lieu inédit destiné à faire rayonner la philanthropie. L’Hôtel de la Bûcherie a un passé historique très fort puisqu’on y distribuait, au Moyen-Age, de la viande aux indigents. Ce lieu magnifique a été totalement rénové par la Compagnie de Phalsbourg, entourée de Perrot & Richard, architectes, et du designer Ramy Fischer.
Existe t-il des lieux similaires ailleurs en Europe?
Le Philanthro-Lab est un concept unique, qui n’a pas d’équivalent dans le monde. Il existe bien quelques lieux comme la Philanthropy House à Bruxelles qui accueille des structures comme l’European Foundation center (EFC), Promethea ou le DAFNE[1] mais aucune de ces structures ne se rapproche véritablement de ce que le Philanthro-Lab souhaite mettre en place.
Justement quelles sont les différentes missions du Philanthro-Lab ?
Le Philanthro-Lab se veut avant tout un lieu de vie. Le contexte sanitaire bouscule son calendrier et son lancement auprès du grand public mais nous avons tenu à accueillir nos premiers coworkers depuis septembre dernier. Notre espace de coworking, dédié à la fois aux mécènes et aux porteurs de projets, en accueillera à terme 180, avec un juste équilibre entre les deux. L’idée est de créer un écosystème autour d’acteurs aux problématiques similaires et faire ainsi émerger des idées, faciliter les rencontres avec des experts du domaine : juristes, financiers, communicants, etc. Nous essayons de trouver un équilibre entre les différentes causes d’intérêt général. Nous sommes également un incubateur pour accompagner les porteurs de projets et les philanthropes dans le développement de leurs idées.
L’appel aux porteurs de projets a déjà eu lieu, quels ont été les résultats ?
Nous avons en effet lancé cet été un appel à projets et sélectionné 7 porteurs de projets début octobre sur la cinquantaine de dossiers reçus. Les lauréats sont Activ’Action, Arpamed, La Fabrique de la Danse, Ikigaï, in:Expeditions, Passeur de mots, passeur d’histoires et Yes Asso. Outre la résidence gratuite au sein de nos locaux durant 10 mois, les lauréats bénéficieront d’un accompagnement personnalisé pour les aider à structurer leur projet, à mettre en place une gouvernance efficace, déployer leur stratégie de développement ou de collecte de fonds, structurer leur communication, mesurer leur impact, etc. Il s’agira pour eux d’un véritable « programme d’accélération ».
Et pour les philanthropes ?
En ce qui concerne les philanthropes, nous allons lancer un appel à projets en décembre pour une mise en place en février 2021. Il est destiné à des personnes qui envisagent d’initier une démarche philanthropique (phases d’idéation et de création). Il s’adresse aussi à des fonds de dotation/fondations privées ou d’entreprise existants, qui souhaitent professionnaliser leur stratégie philanthropique. Nous leur proposons un programme dit « d’émergence » qui les aidera à définir leur stratégie, fédérer leurs partenaires, développer leur stratégie de collecte de fonds, de veille et de mesure d’impact, et de gestion des aspects fiscaux liés à la philanthropie.
Quelles sont les différentes formes de soutien proposées par le Philanthro-Lab ?
Nous allons développer des formations collectives (juridique, comptabilité, fundraising, gestion de projets, communication, RH) mais aussi des ateliers et masterclasses. Nous mettrons parallèlement en place des formations individuelles (stratégie, business model, pitch) et du mentorat, grâce à des personnalités qualifiées sélectionnées pour leurs compétences. Tout cela en favorisant les moments d’échange conviviaux.
Ce nouveau lieu a également pour objectif d’attirer le « grand public » en quoi cela consistera t-il ?
Nous espérons ouvrir notre lieu au grand public dès le printemps prochain, avec un seul but : démocratiser la philanthropie. Il y aura une multitude de choix, pour tous les auditoires : concerts, stands-up, expositions avec des artistes engagés ou des collections de fondations d’entreprises par exemple. Nous souhaitons être un démonstrateur pour donner à voir la philanthropie et permettre à tous de s’engager. Nous allons également élaborer des programmations pour les publics scolaires afin de leur faire découvrir tous les aspects de la philanthropie. Enfin, nous hébergerons un restaurant ainsi qu’un bar où nous proposerons un « arrondi solidaire ». Toute la programmation sera gratuite bien entendu ; notre objectif est de moderniser l’image de la philanthropie aux yeux de nos concitoyens et d’apporter notre petite pierre à son édifice.
A lire aussi : Comment réinventer la philanthropie
[1] Donors and Foundations Networks in Europe
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