Fonds de dotations versus Fondations
pascale.strubel

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Le fonds de dotation, le couteau suisse de la philanthropie ?

Créés par la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 les Fonds de dotation ont, depuis cette date, connu un succès fulgurant puisqu’on en compte aujourd’hui plus de 2600[1], un chiffre qui a triplé en à peine 5 ans au détriment d’autres formes de structures telles que les Fondations d’entreprise ou encore les Fondations reconnues d’utilité publique. D’après les chiffres du Centre Français des Fonds et Fondations, les Fonds de dotation sont désormais plus nombreux que les Fondations dans toutes les Régions françaises (hors Ile-de-France).

Objectif atteint donc pour cette loi mise en place dans le but d’« attirer les financements privés pour des opération d’intérêt général ». L’idée était de fait de créer un outil simple et attractif afin de faciliter les levées de fonds à destination d’organismes d’intérêt général et promouvoir ainsi la philanthropie en France, sur le modèle américain de « l’endowment fund ».

Et, si la majorité des fonds de dotation ont été créés par des personnes physiques ou morales de droit privé (associations, particuliers, etc.), les établissements publics s’intéressent de plus en plus à cet outil juridique et financier : musées (Le Louvre ayant été le premier à le faire en 2009), hôpitaux, collectivités territoriales, etc. y ont désormais recours.

Simple, souple et efficace

La constitution d’un fonds de dotation ne requiert ni groupe de fondateurs, (seulement une dotation initiale de 15KE depuis janvier 2015 pour lutter contre la création des fonds « coquilles vides »), ni fixation d’une durée de vie, ni même autorisation administrative. Les fonds doivent simplement être déclarés auprès de la préfecture du département de leur siège social. Leur mode de fonctionnement est également plus souple puisque la seule contrainte de son Conseil d’administration est qu’il soit composé de 3 membres.

Côté fiscalité, là encore, les Fonds de dotation disposent de véritables avantages puisqu’ils bénéficient de la fiscalité des organismes sans but lucratif. Par ailleurs, contrairement aux Fondations d’entreprise, les Fonds peuvent recevoir des dons et legs et parfois même faire appel à la générosité du public, après autorisation préfectorale.

Infographie_Fonds de dotation_Fondations

Forte appétence de la part des collectivités locales

Outre les associations, on constate que les acteurs publics, comme les collectivités locales montrent de plus en plus d’intérêt pour cet outil de financement. Des villes comme Paris (Paris Création, Fonds pour Paris), Nantes, Bordeaux, Rennes, Cannes ont ainsi créé des Fonds de dotation. « Perçues comme simples, ces créations assurent une mise en place rapide de la structure juridique. Les dispositions fiscales incitatives figurent également comme un facteur de satisfaction (…) que ce soit pour les particuliers ou les entreprises », peut-on lire dans l’étude très complète d’EY sur Le mécénat au bénéfice des collectivités territoriales françaises (septembre 2016). Souvent dédiés à la valorisation du patrimoine culturel régional, certains de ces fonds se consacrent cependant aussi à des causes plus sociales comme la lutte contre l’exclusion ou la réduction des inégalités.

Les grandes entreprises à la traîne ?

Les entreprises de leur côté ont mis un certain temps avant de s’intéresser à ce nouvel outil, préférant mettre en place une Fondation d’entreprise, principalement pour des raisons d’image. En effet, la Fondation d’entreprise, créée par autorisation de la Préfecture, encadré par un Conseil d’administration disposant de collèges obligatoires (dont un collège de personnes extérieures qualifiées) est un vrai gage de sérieux et de transparence, garant de la bonne affectation des montants attribués aux actions de solidarités (cf. article « Créer une Fondation d’entreprise, pourquoi ? »).

Le mouvement semble pourtant s’inverser peu à peu. Accor, premier opérateur hôtelier mondial, a par exemple transformé en 2013 sa fondation d’entreprise en un fonds de dotation, Solidarity Accor, afin de bénéficier de nouvelles ressources et de collecter des dons auprès d’un plus grand nombre de parties prenantes. Les collaborateurs ainsi que les partenaires franchisés ou encore les clients peuvent donc aujourd’hui contribuer financièrement aux initiatives déployées dans les pays où Accor est présent.

Les grands groupes tels Danone, Seb, Dassault Système, Peugeot, Bel ou même le MEDEF, pour n’en citer que quelques-uns, ont depuis créé leurs Fonds de dotation qui bénéficient très souvent d’apports financiers plus que conséquents.

Les TPE/PME en embuscade

Les Fonds de dotation peuvent également s’avérer particulièrement intéressants pour les TPE/PME. Comme expliqué dans notre article « Le cercle des entreprises mécènes, un cercle vertueux », l’alliance des PME/TPE dans une seule et même structure juridique peut devenir une véritable force de frappe. Le Fonds de dotation, moins contraignant à créer et à gérer que la Fondation d’entreprise, peut ainsi devenir l’outil idéal pour ces entreprises.

Le fonds de dotation Synergie Solaire est en ce sens un exemple remarquable. Avec pour objectif de fédérer la filière Energies Renouvables (EnR), ce Fonds développe des solutions d’accès aux Énergies Renouvelables pour les populations pauvres à travers le monde, qui ne peuvent satisfaire leurs besoins vitaux (eau, alimentation, éducation, santé) faute d’accès à l’électricité. Ainsi, depuis 2010, 162 entreprises de la filière EnR française se sont investies dans Synergie Solaire afin de concrétiser des projets d’accès à l’énergie, soit 36 projets dans 13 pays pour 340 000 bénéficiaires !

Force est donc de constater que les entreprises, associations, acteurs locaux, etc. disposent aujourd’hui de dispositifs divers et attractifs pour mettre en place des actions de mécénat pour pallier, du moins en partie, la diminution des aides publiques. La combinaison de ces outils devient par là même un levier puissant au service de causes d’intérêt général à la fois essentielles et fédératrices.

[1] Deloitte, Fonds de Dotation – L’Observatoire – 30 juin 2017

 

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